le 30 octobre 2024
  • Recherche

  • Actualités recherche

Publié le 7 novembre 2024 Mis à jour le 18 novembre 2024

Ségrégation scolaire et résidentielle, analyse économique face aux inégalités

Groupe scolaire en Norvège
Groupe scolaire en Norvège - Les études de Landaud et Segú s'appuient sur des expérimentations dans des écoles norvégiennes. - Photo : Groupe scolaire de la municipalité de Søndre Land, en Norvège. - © Wolfmann, Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International

Fanny Landaud et Mariona Segú sont lauréates du programme Emergence 2024. Leur projet EDEN vise à étudier l'impact des politiques économiques et urbaines sur les inégalités scolaires et résidentielles.

CY Initiative : Pourriez-vous vous présenter et nous en dire plus sur votre carrière et vos grandes thématiques de recherche ? 
Fanny Landaud : Je suis chercheuse en économie, spécialisée en économie appliquée au sein du laboratoire THEMA. Je m'intéresse principalement aux questions liées aux inégalités et en particulier aux inégalités scolaires. Je cherche à comprendre les déterminants de ces inégalités ainsi que leurs conséquences. Je m’interroge également sur les politiques qui sont susceptibles de les réduire, en incluant notamment les inégalités de genre mais aussi les inégalités socio-économiques. J'ai fait ma thèse à l'école d'économie de Paris puis un post-doc en Norvège. J'ai également passé quelques mois en post-doc à l’Insead. J'ai intégré CY Cergy Paris Université en 2023.

CY Initiative : Vous avez été lauréate de l’appel à projets 2024 de CY Initiative. En quoi consiste ce projet ? Quel est son objectif ?
Fanny Landaud : 
Ce projet se situe à l'intersection de l’économie de l’éducation et de l’économie urbaine. J’y travaille en collaboration avec Mariona Segú, enseignante-chercheuse au laboratoire THEMA.
Fanny Landaud
Fanny Landaud - Fanny Landaud est enseignante-chercheuse en économie à CY Cergy Paris Université. - © Fanny Landaud
Je couvre principalement les aspects liés à l’économie de l’éducation alors que de son côté Mariona Segú travaille plutôt en économie urbaine. Nos deux expertises nous permettent d’être complémentaires. Notre projet propose d’étudier la ségrégation résidentielle et la ségrégation scolaire, leurs déterminants et leurs conséquences. Nous regardons par exemple comment les politiques d'affectation à l'école peuvent impacter la ségrégation résidentielle ou, à l'inverse, les conséquences des politiques visant à améliorer la diversité d’un quartier : ces politiques ont-elles des répercussions directes sur la diversité scolaire ? Ou bien sont-elles contrecarrées par des comportements d’évitement des parents ? 

CY Initiative : Concrètement, comment va se déployer ce projet ? En quoi le projet répond-il à des enjeux actuels ? 
Fanny Landaud : Le projet repose sur 3 grands axes de recherche sur lesquels nous avançons en parallèle. Le premier axe porte sur les politiques d'affectation scolaire et leur impact sur la ségrégation résidentielle. Nous utiliserons des données norvégiennes sur lesquelles nous avons déjà travaillé par le passé et que nous allons étoffer avec de nouvelles données sur la composition des quartiers et les prix des différentes habitations. Le deuxième axe porte sur la manière dont les politiques de la ville peuvent impacter la ségrégation scolaire. Dans un premier temps, à partir de données françaises, nous allons tenter, avec Mariona et d’autres collègues du THEMA, de comprendre comment la composition d'un quartier et la construction de logements sociaux peuvent accroître la diversité des écoles ou provoquer des réactions d’évitement chez les parents. Dans un second temps, à partir de données norvégiennes, nous allons également regarder l’impact de la construction de logements étudiants sur la diversité dans les universités. En rendant les logements plus facilement accessibles et bon marché, cela permet-il à un public étudiant un peu plus défavorisé d'entreprendre des études supérieures ? Le dernier axe porte sur la ségrégation scolaire, et se concentre sur la ségrégation des réseaux d’amitié au sein même des écoles. Nous sommes parties d’un constat : même au sein d'une école, les réseaux d'amitié reproduisent des structures sociales préexistantes, avec par exemple une séparation franche entre filles et garçons. Nous souhaitons comprendre si l'adoption par les enseignants d'une pratique pédagogique axée sur l’apprentissage entre pairs peut générer des interactions de travail entre des élèves qui interagissent habituellement peu, et ainsi casser cet entre-soi. Pour cet axe, nous allons nous baser sur une expérimentation en partenariat avec l’école 42. Ils ont conçu une plateforme d’apprentissage du numérique destinée aux élèves en fin d’école primaire. Sur cette plateforme, les élèves apprennent les bases du numérique avec une méthode d’apprentissage basée sur la coopération avec les pairs. Ils doivent en effet en permanence se faire évaluer par leurs camarades et ils ont aussi la possibilité de demander de l'aide à ces derniers. Nous allons évaluer les conséquences de l’utilisation de cette plateforme grâce à une méthode expérimentale basée sur le tirage au sort et la comparaison d’un groupe témoin et d’un groupe test. Au bout d’un an, nous observerons les réseaux d’amitiés des élèves des groupes tests et témoins ainsi que leurs coopérativités pour comprendre si différentes méthodes pédagogiques peuvent diminuer l’entre-soi et les conséquences de cet entre-soi sur le degré de coopération au sein des classes. 

CY Initiative : Pourquoi avoir candidaté à cet appel à projets ?
Fanny Landaud : 
Le programme Emergence est conçu comme un tremplin permettant de produire des résultats préliminaires sur lesquels nous pourrons nous appuyer pour déposer des projets plus ambitieux par la suite. Avec Mariona, nous aimerions aussi organiser une journée d’études à Cergy pour présenter nos premiers résultats et rencontrer plusieurs chercheurs sur les thématiques de l’éducation et de l’économie urbaine. L’objectif est de créer des synergies et de faire émerger de nouvelles idées.


En savoir plus