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Publié le 14 juin 2024 Mis à jour le 18 juin 2024

Comment rendre les peptides plus actifs pour lutter contre les virus et les microbes ?

En marge de ses activités de recherche, Nadège Lubin-Germain est également vice-présidente adjointe à la gouvernance de CY Cergy Paris Université.
En marge de ses activités de recherche, Nadège Lubin-Germain est également vice-présidente adjointe à la gouvernance de CY Cergy Paris Université. - En marge de ses activités de recherche, Nadège Lubin-Germain est également vice-présidente adjointe à la gouvernance de CY Cergy Paris Université. - © CY Cergy Paris Université

Le projet ALANINE, lauréat 2023 de l’appel à projets de CY Initiative, repose sur la rencontre de deux expertises fortes et complémentaires, celles de Nadège Lubin-Germain et Abdelghani Oukhaled, respectivement chimiste et biophysicien.

Nadège Lubin-Germain, professeur au département de chimie de CY Cergy Paris Université, travaille au sein du laboratoire BioCIS, un centre de recherches affilié à CY Cergy Paris Université, au CNRS et à l’université Paris-Saclay. En tant que chimiste moléculaire, sa spécialité est de synthétiser des molécules qui ont certaines propriétés.
Dans le cadre de ce projet, la collaboration avec Abdelghani Oukhaled a été une évidence. Ce dernier est enseignant-chercheur au sein du laboratoire LAMBE, unité du CNRS rattachée également à Paris-Saclay et à CY Cergy Paris Université. Le professeur Oukhaled développe une technique qui permet de manipuler des molécules une par une et d’en comprendre ainsi les caractéristiques. Peu d’équipes en France ou même dans le monde travaillent sur ce sujet.
Abdelghani Oukhaled est directeur du département de biologie de CY Tech.
Abdelghani Oukhaled est directeur du département de biologie de CY Tech. - Abdelghani Oukhaled est directeur du département de biologie de CY Tech. - © CY Cergy Paris Université

Une complémentarité au cœur du projet 

"On s’intéresse dans le groupe, et ce depuis longtemps, à un sujet qui porte sur la délivrance de molécule bioactive mais de manière ciblée et active. Il ne s’agit pas d’une diffusion laissée libre mais ciblée à un endroit donné et en plus facilité. Concrètement, cela signifie que la molécule ne va n’importe où sur un organe et surtout qu’une fois qu’elle est dans l’organe, elle entre facilement dans la cellule". remarque Nadège Lubin-Germain. Cela nécessite plusieurs outils moléculaires, qui sont en fait de petites portions de protéines ou macromolécules. Une partie de ces macromolécules biologiques s’appellent des peptides.
Dans le cadre de ce projet, le Pr. Lubin-Germain s’intéresse à ces peptides dans leur interaction avec les membranes cellulaires. Ils permettent par exemple de faciliter l’entrée d’un médicament dans la cellule. Il s'agit donc d’étudier quels sont ces peptides, comment les modifier pour qu’ils soient plus actifs sur la membrane et regarder comment ils pénètrent dans la cellule. C’est justement une des expertises du professeur Abdelghani Oukhaled, qui a développé une technique qui permet de comprendre les caractéristiques de ces molécules : "Dans le cadre de mes recherches je regarde justement comment des molécules extérieures peuvent rentrer dans la cellule par des protéines spécifiques que l’on appelle des pores. L’objectif est donc d’accompagner le professeur Lubin-Germain dans l’étude de ces peptides".

Comment rendre les peptides plus actifs ?

Ce projet lauréat de l’appel à projets 2023 de CY Initiative repose sur deux grands objectifs. Le premier est très fondamental, puisqu’il s’agit de comprendre les peptides, qui sont aujourd'hui très peu étudiés. Cela implique notamment d’étudier leur comportement au contact de pores cellulaires, ces dernières étant un objet d’étude du Pr. Abdelghani Oukhaled.  
Le deuxième objectif est de valoriser les peptides eux-mêmes. "Une fois que nous aurons synthétisé et étudié des peptides que l’on aura créés, nous allons essayer d’identifier les peptides très actifs sur les membranes afin de pouvoir les utiliser et les exploiter dans la délivrance de médicaments pour qu’ils soient plus efficaces et ciblés" remarque Nadège Lubin-Germain. 
Pour ce faire, les deux chercheurs vont partir de peptides connus afin de les modifier pour les rendre plus actifs sur les membranes, et même potentiellement leur permettre de détruire ces membranes. Cela pourrait déboucher notamment sur l'élaboration de composés bio-actifs qui pourraient agir contre les virus ou contre les bactéries. L’ensemble de ces peptides synthétisés sont également étudiés pour des activités antivirales en collaboration avec un groupe de chercheurs en Pologne et avec le Pr. Damien Seyer, biologiste à CY Cergy Paris Université (ERRMECe). 

Les premiers peptides synthétisés et caractérisés

Le projet a été lancé avec le concours d’une doctorante qui a rejoint l’équipe en septembre 2023 pour une durée de 3 ans. "A ce stade, nous avons déjà identifié les peptides qui vont être synthétisés puis caractérisés à BioCIS. Notre doctorante, Camille Dejoux a déjà commencé la synthèse de certains peptides et nous essayons donc dans mon laboratoire de comprendre comment ils fonctionnent" note Abdelghani Oukhaled. Nadège Lubin-Germain ajoute : "il ne s’agit pas de tout synthétiser et ensuite d’analyser. On avance petit à petit, ce qui permet à notre doctorante de suivre et de travailler sur les deux étapes, synthétisation et caractérisation. Cela lui permet de comprendre et de maîtriser l’ensemble du projet".
En revanche, l’étude biologique du potentiel antiviral et antibactérien, ne se fera qu’une fois tous les peptides synthétisés. En effet, pour assurer l’homogénéité des tests et ainsi obtenir des résultats fiables, il est indispensable de tester tous les peptides dans des conditions strictement identiques. Au total, l’objectif est de synthétiser une trentaine de peptides. "C’est un vrai défi de rendre ces peptides plus actifs, et encore plus challengeant d’en faire des peptides antiviraux et anti-microbiens. Il faudra en synthétiser beaucoup pour arriver à comprendre ce qu’il faut faire pour les rendre actifs" remarque Nadège Lubin-Germain. 
L’appel à projet CY Initiative a permis à trois laboratoires de travailler ensemble. "Cela nous a permis de nous rencontrer, et de nous structurer pour faire de la recherche pluridisciplinaire", note Abdelghani Oukhaled. Les prochaines grandes étapes : partager cette approche inédite et les premiers résultats lors de congrès professionnels et obtenir des financements européens pour la poursuite du projet.


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