“Le programme Doctorant Fulbright a représenté un formidable accélérateur pour mes recherches”

Pourriez-vous nous en dire plus sur votre parcours ?

Dr. Mailys M. George : J’ai commencé par faire une classe préparatoire pour rejoindre ensuite une école de commerce avant de me décider à faire une thèse. Mon année de master a été charnière dans la suite de mon parcours. En effet, c’est lors de la rédaction de mon mémoire, que l’idée de m’orienter vers de la recherche a maturé. J’ai beaucoup apprécié cette expérience d’écriture, j’ai énormément lu et je me suis beaucoup intéressée et plongée dans la méthodologie. 
C’est ensuite une initiative européenne qui m’a aidée à prendre ma décision. J’ai en effet eu la chance de rejoindre l’initiative Barcelona Activa qui est une école de soft skills qui propose à tous les citoyens européens qui le souhaitent d’avoir accès et de participer à des séances de coaching. C’est dans ce cadre très propice que je me suis posée des questions sur ce que je voulais faire parce que je n’étais pas sûre d’être faite pour le marketing. Je me suis rendue compte que les personnes qui étaient mes modèles et qui m’inspiraient le plus étaient en fait des professeurs et que c’est peut être ce vers quoi je devais me destiner. J’ai ainsi essayé d’explorer cette possibilité en allant interroger mes anciens professeurs sur leur métier et ce qu’il fallait faire pour accéder à de tels postes. Et 8 ans plus tard me voici Assistant Professor à l’EDHEC après un PhD à l’ESSEC sous la direction du Professeur Karoline Strauss et un poste de chercheur postdoctoral à l’IESE en Espagne. 

Pendant ma thèse j'ai eu la chance d’effectuer deux échanges, ou comme on les appelle dans le milieu de l’enseignement et de la recherche des Visiting. Le premier était à KU Leuven en Belgique et le 2ème à George Mason University aux Etats-Unis. C’est pour ce 2ème échange que j’ai obtenu la bourse Fulbright.

Sur quel(s) sujet(s) portent vos travaux de recherche ?

Dr. Mailys M. George : Je travaille sur l’identité et la transition de rôle qui sont deux sujets très liés. 
Sur la transition, j’étudie la manière dont les individus passent d’un rôle à l’autre et les défis qui vont accompagner ce mouvement. Il existe deux types de transitions: les transitions du quotidien, aussi appelées dans le jargon micro transitions, et les transitions séquentielles où l’on quitte un rôle pour en prendre un nouveau, aussi appelées macro transitions. Par exemple, cela peut être un changement de poste dans le milieu professionnel, une transition de carrière, devenir parent, divorcer, devenir veuf…

Dans mes recherches sur l’identité, j’étudie comment les individus entretiennent des représentations d’eux-mêmes qui leur permettent d’avoir un sentiment de continuité, de cohérence dans des contextes qui sont incertains. Cela peut par exemple être dans des contextes où il y a de la discrimination, où il y a de l’insécurité au niveau de l’emploi, la migration…
Et mon travail se concentre aussi sur  l’intersection de ces 2 thèmes qui peuvent être très liés. Quand on vit une transition, on peut aussi avoir des changements d’identité, par exemple, se désidentifier de son rôle précédent et s’identifier à  un nouveau rôle mais cela n’est pas toujours nécessaire. 

Focalisons-nous maintenant sur Fulbright, pourquoi avez-vous postulé au programme ?

Dr. Mailys M. George : J’ai connu le programme Fulbright en 2017 via une newsletter relayée aux doctorants de l’ESSEC et de CY Cergy Paris Université. Même si je n’ai envoyé ma candidature qu’un an après, c’est une information qui est restée dans un coin de ma tête. Cela était une belle opportunité qui pouvait me permettre d’avoir un séjour à l’étranger et notamment aux Etat-Unis, un pays où de nombreux chercheurs réputés travaillent sur mes thématiques de prédilection  : l’identité et les transitions. Le programme Fulbright m'offrait la possibilité de travailler directement sur place avec mon co-auteur Kevin Rockman et de rencontrer d'autres chercheurs de George Mason University et je n’ai donc pas hésité à candidater ! Grâce à la bourse Fulbright, Kevin Rockmann et moi avons pu travailler sur le projet que j’avais soumis à délibération pour l’obtention de cette bourse et qui est l’un des articles de ma thèse. 
Mais cela nous a surtout permis de faire émerger un autre projet ensemble qui est né là-bas, pendant mon visiting. Un projet qui est déjà publié à Academy of management annals et qui est né à la suite d’une discussion avec Kevin et notre collègue Sarah Wittman, autour de la définition du terme des transitions de rôle. Ils m’ont dit que cela ferait un super article et en fait c’est de là qu’est née cette collaboration. Cet article a été un accélérateur de carrière énorme.

J'ai aussi pu commencer à collaborer avec une autre collègue, Heather Vough, durant ce visiting et nous avons  actuellement un article en cours. 
Beaucoup de projets sont nés à la suite de ce visiting. Cela m’a permis d’avancer sur mes projets existants et d’en développer de nouveaux. Cette expérience m'a boostée personnellement et professionnellement, et a favorisé mon insertion sur le marché de l'emploi.

Avec quel projet avez-vous candidaté ?

Dr. Mailys M. George : Le sujet de recherche que j’ai soumis pour Fulbright est en fait un sujet de recherche pour lequel j’ai gagné un prix au PhD poster session de l’ESSEC en 2018 : le moi hypothétique resté dans le pays d’origine. 
Quand vous êtes immigré ou expatrié, ou même étudiant international et que vous quittez votre pays pour étudier ou travailler dans un autre pays, vous pouvez dans de nombreux cas créer une image de vous, une sorte de moi alternatif qui serait resté au pays. Vous pouvez ainsi vous dire “si j’étais resté dans mon pays d’origine, ma vie ressemblerait à ….” “Je serais une personne différente parce que …”... 
Vous créez en fait une sorte d’image de vous-même à laquelle vous pensez parfois. Certaines personnes y pensent beaucoup et d’autres n’y pensent pas ou de temps en temps mais cela vous influence forcément dans le présent. 
J'ai ainsi pu recueillir des témoignages de personnes décrivant leur moi hypothétique et qui ils auraient été. J’ai aussi testé la relation de ce moi hypothétique avec  la satisfaction dans le pays d’accueil, ou l’ajustement de la personne dans le pays d’accueil. Grâce au programme Fulbright et à mon visiting à George Mason University, j’ai pu récolter des données supplémentaires qui ont permis d’enrichir l’un des articles de ma thèse. 
 

Qu’est-ce que le Programme Fulbright vous a apporté et pourquoi le recommanderiez-vous ?

Dr. Mailys M. George : Un visiting est une étape très importante dans une thèse. Cela permet de créer un réseau de collaborateurs plus vaste mais aussi de voir comment les choses sont faites ailleurs. 
Le monde académique est un monde international et vecteur de rencontres enrichissantes. C’est une composante essentielle pour moi qui suis bi-nationale et bi-culturelle, et qui ai vécu dans plusieurs pays différents. 
Les bourses Fulbright ont également un très fort rayonnement international et notamment aux Etats-Unis. Je me souviens qu’une de mes collègues américaines avait été très impressionnée quand je lui avais dit que j’avais obtenu une bourse Fulbright. Ces bourses ont vraiment une aura et cela donne du prestige à votre recherche et à votre profil. 
La bourse Fulbright permet bien sûr une prise en charge du visiting mais cela permet aussi de construire un CV sur la partie de recherche de financement qui est clé. C’est une énorme partie du profil de chercheur que de savoir repérer des financements, y candidater et les obtenir. Fulbright m’a permis de me confronter au montage du dossier et à l’exercice d’aller chercher des financements. Cette première expérience de recherche de financements m'a beaucoup appris et m'a certainement donné des clés pour la recherche d'autres financements par la suite.

A propos de Fulbright

Le programme "Fulbright-CY Initiative" est un programme annuel d'échanges qui permet l’accueil d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs américains dans l’un des établissements partenaires de CY Initiative, et le soutien à la mobilité de doctorants inscrits en thèse dans une des écoles doctorales de CY Cergy Paris Université pour un séjour dans une université ou un institut de recherche aux Etats-Unis. Le programme prévoit, chaque année, le financement d’un à deux chercheurs américains pour un total de dix mois de bourse disponibles. 
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